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Raphael Gargnon

Une aventure de trekking : Le voyage en Corse

#SALEWAFACES

Parfois hostile, et dangereuse, la montagne fascine par sa beauté et son immensité ! Beaucoup sont attirés par ce terrain de jeu sans limites, qui permet de revenir aux choses simples et authentiques. D’ailleurs, la raison pour laquelle j’apprécie tant la nature et ses grands espaces, c’est qu’elle nous rappelle combien nous sommes petits. Pour une fois, l’Homme doit s’incliner et rester humble.

OBien sûr, il y a des milliers d’endroits où l’on peut expérimenter la beauté sauvage de la nature, sans partir très loin de chez soi. Entre la France et l’Italie, en pleine Méditerranée se trouve une île qui incarne parfaitement cette splendeur sauvage : la Corse. Véritable montagne au milieu la mer, elle compte pas moins de 120 sommets dont l’altitude est supérieure à 2000m ! Les reliefs y sont vigoureux et accentués et ce n’est pas un hasard si ses montagnes attirent chaque année les passionnés de montagne en tout genre.
C’est au milieu de ces monts que ce trouve le GR20 qui traverse l’ensemble de la Corse du Nord-Ouest au Sud Est est ainsi réputé pour être l’un des treks les plus durs d’Europe.

Avant la question de partir avec quoi, il faut savoir avec qui partir. Dans une telle aventure, on est parfois poussé dans ses retranchements et le moral n’est pas toujours au beau fixe. C’est précisément pour cette raison que partir avec un ou plusieurs compagnons est important. Au-delà de l’aspect sécuritaire, c’est aussi un moment de partage d’une aventure, d’émotions, de sensations qu’il est si difficile de retranscrire une fois revenu. Partir à deux paraît idéal mais faut-il encore bien choisir avec qui l’on part. Il s’agit de vivre 24/24 ensemble avec une intimité quasi nulle et des moments difficiles. Bien choisir son compagnon de route c’est partir avec quelqu’un qui à la même vision du projet que vous et les mêmes capacités. Une fois le duo idéal trouvé, c’est une partie de plaisir. On se soutient mutuellement dans les moments durs, on partage les plaisirs des instants de vie ensemble, on partage une aventure humaine. Dans notre cas, une aventure partagée entre cousins.

Avec Paul, nous avons décidé de nous lancer dans ce périple de près de 200km, constitué de 16 étapes. Nous avons fait le choix de partir en autonomie complète : bivouac et nourriture dans le sac à dos. Il était important pour nous d’être complètement autonome, cela signifie une liberté totale sur la façon de réaliser le parcours et sur le choix des différentes options lors des étapes. Cela permet aussi de se concentrer sur l’essentiel et de ne prendre que le strict minimum. Le poids ayant une importance cruciale, nous avons choisi avec minutie chaque élément et nous sommes équipés de matériel technique et léger. Salewa a été d’une précieuse aide en ce sens. Nous sommes partis avec des sacs d’environ 18kg chacun. Cela comprenait trois tenues, environ 10kg de nourriture pour deux, tente et affaire de couchage, matériel photo et une capacité d’environ 3l d’eau par personne.

Corsica

Les premiers jours donnent le ton : les reliefs sont abrupts et massifs. La partie nord du trek est très technique, les étapes sont plus courtes mais le terrain est escarpé et peu évident. Nous suivons les fameuses marques blanches et rouges du GR qui nous guident dans des pentes raides où l’on ne s'aventurait pas sans indications ! C’est sauvage et très vite la végétation se raréfie pour laisser place à des amas de roche. Les paysages sont magnifiques, il y a un côté épique dans les panoramas : puissantes et grandes, les montagnes se chevauchent à perte de vue. Au fond la mer est omniprésente, nous rappelant que nous sommes sur une île. Nous doublons la quasi-totalité des étapes, ce qui impose de conserver un rythme de marche relativement soutenu pour parvenir avant la fin de la journée au refuge ou à la bergerie car le camping sauvage est interdit en Corse. Nous posons donc notre tente Litetrek Pro dans les espaces prévus pour camper. C’est l’occasion de rencontrer des compagnons d’un soir ou de partager la journée avec les compagnons retrouvés de la veille. Sur le GR20 on croise des randonneurs de toutes nationalités, le temps d’une étape, d’un dîner en refuge. Il y a ce père et son fils qui veulent vivre une épreuve sportive et intense. Ce parisien qui a besoin de se retrouver avec lui-même. Ce retraité normand et son neveu, Georges et Benjamin, qui se sont retrouvés pour l’occasion. Nous rencontrons toutes sortes de passionnés passionnants. Les objectifs et les motivations sont différents pour chacun. Mais c’est une passion commune pour la montagne et une volonté d’aventure qui nous relient tous sur les parcours escarpés corses.

Notre tente est notre maison ! Malgré des nuits froides en altitude, nous apprécions son isolation. Les 3 arceaux qui se croisent sur lesquels on vient fixer le double toit restent à l’extérieur, cela surprend mais c’est efficace, elle est d’une stabilité impressionnante en grand vent. L’abside à l’entrée de la tente est suffisamment spacieuse pour loger et protéger nos deux sacs. Nous ne sommes pas trop serrés à deux et nous avons même un peu de place aux pieds pour garder avec nous les affaires qui craignent l’humidité (mon appareil photo notamment!). Son plus gros avantage reste son poids : 1,7kg ! Sachant que nos duvets pèsent 850g, c’est le bonheur d’avoir un combo couchage aussi léger !

Corsica

Comme beaucoup d’activités en montagne, les conditions météo déterminent grandement la réussite ou non du périple. De notre côté, nous avons beaucoup de chance car les conditions sont réunies pour que nous puissions faire l’intégralité du GR dans les meilleurs délais. La météo aurait pu nous empêcher de doubler certaines étapes, trop dangereuses par mauvais temps. Une fois en haut, les nuages à l’horizon nous rappellent que si nous sommes parvenus au sommet c’est uniquement parce qu'elle l’a accepté. Dans un monde où la conscience générale considère enfin la protection de la fragile nature comme une priorité, le trek en autonomie est un mode d’exploration et de vacance idéal. On prendra le temps d’admirer chaque détail que nous offre la beauté de la nature et on sera surpris de la diversité des paysages que l’on peut voir en une simple journée. Chaque bivouac, chaque col, chaque paysage grandiose est mérité et attendu. C’est le plaisir de redécouvrir les distances que nous sommes capables de parcourir seulement grâce à la force de notre corps. En marchant ainsi en autonomie là où l’Homme à laisser la nature garder sa place, c’est prendre conscience de l’équilibre fragile de celle-ci. On apprend à la respecter en ne laissant aucune trace de notre passage, aucun déchet ou nourriture au sol, seulement l’empreinte de nos chaussures dans notre sillage, tel un escargot avec sa maison sur le dos. Ce mode de voyage, d’aventure c’est revenir à un mode de vie simple parfois difficile mais aussi confortable à sa façon.

Corsica

L’eau est assez abondante en Corse : torrents, rivières et cascades creusent les reliefs. On croise également le long du GR20 des lacs de montagne et des pozzines : de vastes prairies naturelles irriguées par les sources. Néanmoins les sources sont plus rares sur le parcours du GR et à la fin de l’été, il est fréquent que ces dernières soient à sec. Il faut donc anticiper les réserves d’eau au départ du campement tous les matins. Ainsi, nous disposons chacun de 4 flasques et d’une poche à eau. En moyenne, nous buvons chacun 4 litres d’eau par jour. Chaque midi, nous avons un encas à base de pain et de saucisson corse. Le soir nous terminons par un repas lyophilisé en tente. Nous en avons un par jour et avons opté pour formules doubles portion que nous nous partagions. Pour chaque sachet de 250g, nous avons en moyenne 1080g de nourriture réhydratée. Des repas simples, copieux, et diversifiés ! De temps à autre, nous nous laissons tenter par des extra dans les refuges : miche de pain et fromage de chèvre ont une saveur particulière après une longue journée, aussi bon pour le corps que pour le moral !

Alors que la partie nord était particulièrement technique et accidentée, le sud est beaucoup plus roulant ! Au-delà du terrain, ce sont aussi les paysages qui changent radicalement : lors des premiers jours, la végétation était si rare, qu’on se croyait parfois sur la lune. Au Sud, les montagnes sont plus hospitalières et les forêts sont également beaucoup plus nombreuses : nous y ramassons des poignées de mûres sauvages, c’est le bonheur. Le GR20 nous offre aussi des rencontres avec la faune locale. Notamment les mouflons du Haut Asco, animal emblématique et endémique de la vallée, peu visible. Les choucas, les brebis ou encore ces vaches solitaires que l’on retrouve dans des endroits improbables et escarpés.

Nous suivons de longues courbes de niveau et des chemins de crête qui limitent le dénivelé positif/négatif. La vue sur les massifs acres-rouges du sud avec la mer en fond est sublime et nous pousse à avancer dans la garrigue. Après 9 jours de marche, et une ultime descente nous parvenons en haut du petit village de Conca puis de la pancarte qui marque la fin du GR20 : nous sommes arrivés au terme de notre « odyssée ». Une aventure intense et tellement belle sur un parcours atypique. Le périple corse touche à sa fin, véritable voyage hors du temps où dans le calme des reliefs, on se retrouve avec soi-même. En bref, une interprétation de “Pure Mountain”.

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